Les récits du soulèvement, du procès, de
l'épouvante qui régnait à Moscou, me firent une très forte impression ; un
monde nouveau m'était révélé, vers lequel convergeait de plus en plus ma vie
intérieure. Je ne sais comment cela se fit, mais tout en comprenant peu, ou de
façon vague, ce que tout cela signifiait, je sentais que je ne me trouvai pas
du côté de la mitraille et de la victoire, de la prison et des chaînes.
L'exécution de Pestel et de ses camarades tira définitivement mon âme de son
sommeil d'enfant.
— Alexandre Herzen, Passé et
méditation
Le 14 décembre 1825, de jeunes officiers de l’Armée
impériale russe prennent les armes contre leur souverain pour réclamer une
constitution.
A lire:
A travers une relecture des projets constitutionnels des
décembristes et de leurs contemporains, l’auteur entreprend de rendre compte de
la richesse et de la complexité des idées politiques qui s’affrontent en Russie
entre 1770 et 1830, au moment où émerge l’idée républicaine en terre
d’autocratie. Plusieurs approches se croisent dans ce travail : histoire,
science politique et lexicologie politique sont convoquées tour à tour pour
saisir pleinement l’entrée de la Russie en modernité politique.
L’enjeu est d’importance : en mettant au jour les fondements
de l’idée de res publica à l’aube du XIXe siècle, l’ouvrage donne des clés de
lecture pour comprendre, par-delà les ruptures politiques évidentes et
soudaines, les hésitations et les raidissements de l’Etat russe en ce début de
XXIe siècle. Les difficultés soulevées par les décembristes, immensité du
territoire national, définition de la citoyenneté, modalités de la
représentation politique, rôle de l’élection, entrent en effet en consonance
avec des questionnements contemporains, en une singulière concordance des
temps.
Cet essai jette ainsi les bases d’une histoire conceptuelle
du politique qui contribue à éclairer sous un jour nouveau les problèmes
auxquels se heurte aujourd’hui la Fédération de Russie.
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