dimanche 12 août 2012

Le rouge de deux bouches - Paul Célan



Les soirs se creusent
sous ton œil. Recueillies
avec la lèvre, des syllabes – beau
cercle en silence –
guident l’étoile qui rampe
vers leur centre. La pierre,
autrefois proche des tempes, ici s’ouvre


Sept heures de nuit, sept ans de veille :
tu joues avec des haches,
couché dans l'ombre de cadavres dressés
- ô les arbres que tu n'abats pas ! -,
le faste des choses tues à la tête,
la vétille des mots aux pieds,
couché, tu joues avec des haches -
et comme elles enfin tu étincelles.


NUIT

Pierraille, éboulis. Et un bruit de tessons, grêle :
l'heure s'adresse à toi.

Echange d'yeux, enfin, à contretemps :
arrêtée sur l'image,
devenue bois,
la rétine _ :
le signe d'éternité.

Pensable :
là-haut, au milieu des poutrelles du monde,
stellaire,
le rouge de deux bouches.

Audible (avant le jour ?) : une pierre,
qui en prit une autre pour cible.


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