Dans La campagne du Mexique, 1862-1867 ; récits de soldats chez
GIOVANANGELI, il ressort dans de nombreux témoignages que des soldats français
ont désertés pour rejoindre les Juaristes. On les retrouve des fois aux côtés
de "mercenaires" américains, d'autres fois seuls, ou en groupe, ayant
ou non des responsabilités militaires. A la fin d'un combat acharné, des
zouaves embrochent un déserteur français à la baïonnette. Il s'était déguisé
en femme et réfugié dans un placard.
Pourquoi?
-Dureté du service dans cette
contrée? (Explication valable et séculaire...)
-Tentation d’obtenir un grade
plus élevé dans l'armée Juariste? (Je n'ai pas d'exemple précis mais il est
sous entendu dans certains récits que certains déserteurs servent comme
officiers chez l'ennemi)
-Appât du gain et/ou volonté de
se refaire une identité en rejoignant certaines guérillas qui pillent plus
qu'ils ne combattent? (Au-delà du cliché du film hollywoodien)
-Par idéal? (Certains combattants
soldats ou officiers se posent la question de leur présence au Mexique ou ne
l'approuvent pas, par anticléricalisme ou par républicanisme, ce qui ne les
empêche pas de se battre mais certains sont peut-être passés à l'acte, il y a
aussi des exemples de résidents français au Mexique qui sont pro-Juaristes).
"Certains se plaignent de faire une « guerre de jambes » qui les
conduit à marcher sans but. D’autres s’interrogent sur le sens de leur combat :
« Nous voulons bien faire la guerre, écrit le soldat Philippe Ledémé, mais non
pas être gendarmes d’Almonte [général mexicain soutenu par les Français], ni
même d’un archiduc. » Ces désillusions offrent un terrain propice à la
désertion contre laquelle la prévôté doit lutter. Selon les archives de la
justice militaire, à partir de 1864, le nombre de déserteurs est multiplié par
trois ou quatre pour atteindre le chiffre d’un cas environ par semaine. Le
phénomène devient important si on ajoute tous les déserteurs non jugés, faute
d’avoir été capturés."
In L’emploi de la gendarmerie au Mexique (1861-1867), force prévôtale ou
force de sécurité intérieure ? Benoît Haberbusch,
http://rha.revues.org/6910
"Mais la désertion morale de l'armée française avait d'autres
sources qui réduisaient d'autant les chances de succès. Henri de Suckau
soulignait les deux travers de la politique française : l'impréparation de
l'opinion d'une part, le manque de motivation et le désir de rentrer au pays
cultivé par les soldats du corps expéditionnaire d'autre part. Tout en cumulant
leurs effets pour favoriser l'abandon d'une politique, ces deux réalités sont
assez indépendantes l'une de l'autre. Mais, pour aussi déterminantes qu'elles
soient, elles n'expliquent pas tout. En effet, la désertion morale des soldats
de l'expédition ne s'est pas développée progressivement, au fil de l'expérience
acquise et des déceptions d'une campagne qui se prolongeait trop. Elle a surgi
très tôt, dès 1862. Principal témoin de cette désaffection des hommes du corps
expéditionnaire : le médecin major Aronssohn. Cette affaire est un four
immense, écrit-il le 4 décembre 1862. Le lendemain, il ajoute : Hier circulait
un bruit de paix. Si cela pouvait être vrai (...) mais ce doit être un canard.
Ce serait quand même la meilleure solution d'une affaire que toute l'armée
considère comme une grossière bêtise. Le 20 février 1863, il s'inquiète que le
nombre des déserteurs augmente. Il y en a tous les jours. Il en témoigne encore
3 ans plus tard, en juillet 1866 : nous avons vu des corps où la désertion
éclaircit très promptement (...) on déserte par 20, 30 à la fois. Le véritable
motif du dernier abandon de Chihuahua était dans les désertions du 7ème de
ligne, si nombreuses qu'on allait se voir réduit à rien. Peut-être plus clair
?"
In Napoléon III Et Le Mexique - Les Illusions D'un Grand Dessein de Jean-François
Lecaillon
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