18 décembre 1870, gare du PLM à
Nuits. Émiland s’éveille parmi les francs-tireurs des Pyrénées-Orientales, avec
l’envie de mettre de l’ordre dans ses idées. Il a vécu les graves évènements de
la guerre avec une certaine indifférence. Mais on a déclaré la Patrie en danger
et la République a été proclamée. À la fin novembre, le jeune homme a quitté le
lycée pour rejoindre son ami Francisque au corps franc des Vosges… Il ne sait
pas encore que, dans quelques heures, un peu par hasard, il va se trouver au
cœur d’une terrible bataille entre les Prussiens et l’armée du général Crémer.
Dans ce déferlement de violence, dans le sang et la souffrance, il y aura la
rencontre avec Louise…
Alain Fauconnier fait revivre
avec rigueur et passion cet épisode tragique de la guerre de 1870-1871 en
Bourgogne, en s’inspirant de ce que les acteurs et les témoins vécurent et
ressentirent. Un grand roman dont l’action se situe entre Genlis, Dijon, Nuits-Saint-Georges,
Beaune et Tournus, pour nous faire vivre sur le terrain cet épisode douloureux
de l’histoire de France.
Un roman "historique" avec son inévitable amourette... Ce qui ne se fait que trop en France, en "romans" comme en téléfilms... Le peu d'intérêt réside ici en ce que l'action se déroule pendant la phase républicaine de la guerre de 1870 et du triste combat de Nuits Saint-George.
La bataille de Nuits, le 18 décembre 1870.
L'armée prussienne du Sud, sous
les ordres du général von Manteuffel, couvre tout le secteur allant de la
région d'Orléans à la frontière suisse. Sa mission est de couvrir la voie de
communication principale de l'armée prussienne, qui passe par la Lorraine, et
de procéder à la réduction des garnisons française du théâtre d'opération. La
plus tenace de celles-ci est la forteresse de Belfort, qui résistera d'ailleurs
jusqu'à l'armistice.
Mais la menace la plus immédiate
pour les Allemands est la première offensive du général Guiseppe Garibaldi (qui
fera l'objet d'un scénario ultérieur) pour reprendre la ville de Dijon.
Cheville ouvrière de l'armée du Sud, le XIV corps du général von Werder
repousse Garibaldi le 27 novembre à la bataille de Pâques (15 kilomètres à
l'ouest de Dijon). A compter de cette date, les Allemands se mettent dans une
position d'attente pour se reposer et se réorganiser. C'est chose faite à la mi-décembre,
date à laquelle ils envisagent des opérations plus offensives. La première de
celles-ci a lieu le 16 décembre et est dirigée sur Langres, nid de francs-tireurs
qui mettaient à mal les communications prussiennes. Les Allemands dispersent
les Français. Le 17 décembre, les Badois de von Glümer sont concentrés sur
Dijon et reçoivent comme missions pour le lendemain de lancer une
reconnaissance en force sur Nuits où les Français sont signalés. Les Allemands
s'attendent à disperser les Français avec leur facilité habituelle. L'avenir
leur donnera tort.
Car en face, le général Cremer a
repris en mains les troupes françaises. Il dispose des mêmes effectifs que les
Allemands, à savoir une division, et est fermement décidé à montrer que
l'honneur des troupes françaises est intact. Ses effectifs sont les suivants :
1ère brigade
Gardes mobiles de Gironde 1 bataillon
32ème régiment de marche 3 bataillons
57ème régiment de marche 3 bataillons
2ème brigade
Volontaires du Rhône 1 bataillon
1ère légion du Rhône 3 bataillons
2ème légion du Rhône 3 bataillons
Aucune cavalerie n'est présente,
mais trois batteries (une de 9 Livre et deux de 4 Livres), soit 18 canons,
complètent l'effectif. Le moral est bon, sauf pour les légions du Rhône, minées
par l'indiscipline. Quant à l'armement, il est excellent. Les régiments de
marche et la première légion sont armées de Chassepots, tandis que les autres
sont armés de carabines Spenser ou Remington d'importation. L'artillerie est
d'origine française, sauf la batterie de 9 qui est là aussi une Armstrong (en
acier) d'origine anglaise.
La disposition des Français est
la suivante. Un bataillon du 32ème de Marche, avec deux canons, tiennent les
hameaux de La Berchère, Boncourt et Agencourt. Entre Preneaux et la gare de
Nuits, deux bataillons de la 2ème légion du Rhône avec six canons. Dans la gare
elle-même, un bataillon du 32ème de Marche. Entre Vosne et la gare, le
bataillon de volontaires du Rhône et le bataillon des gardes mobiles de
Gironde. A Vosne même un bataillon de la 1ère légion du Rhône. A Nuits se
trouvait le général Crémer avec une première réserve formée de deux bataillons
de la 1ère légion du Rhône. Une seconde réserve se trouvait sur les hauteurs de
Chaux avec le bataillon restant de la 2ème légion du Rhône et le bataillon
restants du 32ème de Marche. Cette force était censée empêcher un débordement
par l'arrière du front. S'y trouvait également 10 canons qui pouvaient battre
tout le front français. On remarquera qu'il manque le 57ème de marche. Il est à
Beaune et, prévenu tôt le matin, se met immédiatement en marche.
Le terrain avantage la défense.
La contre-pente de Chaux est occupée par des vergers qui forment un terrain peu
praticable. En avant, les villages de Premeaux et Vosnes, ainsi que la ville de
Nuits (4 000 habitants) peuvent être facilement défendables grâces à de
nombreux murets qui entourent les maisons. Ensuite, la ligne de chemins de fer
qui coupe le terrain en deux est une ligne de défense naturelle car elle forme
un profond fossé au sud, un large talus au nord. Enfin, les hameaux de La
Berchère, Boncourt et Agencourt peuvent eux-aussi êtres puissamment fortifiés.
Les forces badoises sont divisées
en une Avant-Garde, un Gros et un Flanc-Garde (à droite du dispositif
principal).
Avant-Garde (gén. Von Willisen)
Régiments des Gardes du
Corps 3 bataillons.
1 Batterie d'artillerie et 1
escadron de cavalerie.
Gros (gén. Prince Guillaume de
Bade)
2ème régiment de Grenadiers 3 bataillons
3ème régiment d'infanterie 2 bataillons
4 batteries d'artillerie et 5
escadrons de cavalerie.
Flanc-Garde (gén. Von Degenfeld)
3ème régiment d'infanterie 1 bataillon
4ème régiment d'infanterie 3 bataillons
1 batterie d'artillerie et 1
escadron de cavalerie.
L'avant garde et le gros des
Badois se présente sur la droite française, par Soulon, la Rue et Epernay
(nord, à l'est de la voie de chemins de fer). Le flanc-garde est dirigé en
ordre dispersé du nord et de l'est. Un bataillon et un escadron suivent la
grande route par Vougeot (au nord de Vosne, à l'ouest de la voie de chemins de
fer) ; un bataillon est dirigé sur Concoeur (hauteur directement au Nord de
Chaux) ; enfin deux bataillons et une batterie venaient de Curley et
Villers-Fontaine (nord-ouest).
La bataille
Les troupes badoises, qui
quittent Dijon au lever du jour, arrivent aux abords de Nuits en fin de
matinée. Le régiment des Gardes du Corps est le premier à se déployer et, à
midi, attaque le hameau de Boncourt qu'il enlève rapidement aux hommes du 32ème
de marche. Ce dernier se replie sur La Berchère et, soutenu par le bataillon
des volontaires de Gironde, oppose une vive résistance aux Badois, avant que
ces dernier ne se rendent maître de la position vers 13 heures 30. A cette
heure, l'avant-garde des Badois est toujours seule sur le champ de bataille et,
faisant preuve d'une trop grande témérité, attaque la voie de chemin de fer
solidement tenue par les Français. Ces derniers repoussent sèchement le
régiment des Gardes du Corps qui se replie sur les positions conquises, d'où ils
engagent une fusillade en attendant les renforts.
Ceux-ci débouchent sur le champ
de bataille en milieu d'après-midi seulement. La journée est déjà bien avancée
et les Allemands, pour emporter la décision, se résignent à engager un assaut
frontal. Il est 16 heures lorsque les Badois se déploient pour se ruer à
l'assaut. Deux bataillons (un du régiment des Gardes du Corps et un du 2ème
régiment des Grenadiers) sont dirigés sur la gare tandis que quatre bataillons
(les deux derniers des Gardes du Corps et les deux dernier des Grenadiers)
engagent les Français plus au nord, entre la gare et Vosne. Mais les Français
opposent une résistance acharnée, d'autant plus que Cremer fait entrer en ligne
ses réserves. Les deux corps d'élite badois n'arrivent à tourner l'obstacle de
la voie de chemin de fer qu'avec l'appoint des réserves, formées du 3ème
régiment d'infanterie. Il est déjà tard et les Badois se lancent à l'assaut de
Nuits, repoussant une contre-attaque du 57ème régiment de marche qui fait enfin
son apparition sur le champs de bataille. C'est dans la pénombre que les Badois
repoussent les Français du village. Il est 18 heures, la nuit tombe enfin.
Les autres actions de la journée
n'ont donné aucun résultat. Le bataillon badois qui a pris Concoeur reste
inutile sur la position conquise, tandis que les deux bataillons sensés tourner
la position Française par Villers-Fontaine sont arrêtés par les Français
embusqués dans les vignobles. Mais Cremer est conscient d'avoir été battu, sans
avoir failli à l'honneur des armes françaises. Il profite de la nuit, et de
l'arrivée des troupes fraîches du 57ème de marche, pour se replier en bon
ordre. Il laisse quand même sur le champ de bataille 1500 hommes (dont moitié
de prisonniers), tandis que les Allemands déplorent la perte de 900 des leurs.
Le général Cremer
Camille Cremer voit le jour le 6
août 1840 à Sarreguemines.
Fils d’un teinturier lorrain, il
obtient une bourse pour l’ESM en 1857, il en sort 25e sur 240.
Sous-lieutenant en 1859 au 95e
Régiment d’Infanterie, il intègre l’école d’Etat-major en 1860 (sorti 2e sur
23).
Lieutenant en janvier 1862, il
effectue un stage au 10e cuirassiers. En février 1863, il passe aux Dragons de
l’Impératrice.
En janvier 1864, il va au 1er
Zouaves et part au Mexique. Durant son séjour (jusqu’en mai 1866), il se
distingue au combat de Jiquilpan où le 24 octobre 1864, à la Cuesta de Sayala,
il charge hardiment un escadron ennemi avec le peloton d’avant-garde.
Le 22 juin 1864 il est à nouveau
distingué pour avoir conduit avec entrain et intelligence la poursuite d’avant-garde
qui a tué le bandit Pueblita et une partie de sa troupe à Uruapan.
Il est titulaire de la Médaille
du Mexique et fait chevalier de Notre Dame de la Guadalupe.
Il est noté comme "officier
très intelligent, d’un excellent esprit militaire, plein d’envergure et
d’entrain".
Promu Capitaine en janvier 1866,
il passe au 10e RA. En janvier 1867 il est nommé à l’Etat-major de la 21e
division militaire, puis en avril il devient aide de camp du général Clinchant,
son ancien colonel au 1er Zouaves.
Il est promu Chevalier de la
Légion d’Honneur en 1870.
Durant la guerre
franco-prussienne de 1870, il participe aux opérations autour de Metz, et
s’évade avant la reddition de la ville. En décembre il rejoint Gambetta qui le
nomme le même jour, général de brigade et général de division à titre
auxiliaire, ainsi que chef d’escadron.
Il rejoint alors l’armée de l’Est
pour prendre la tête de la 3e Division d’Infanterie du 24e Corps d’Armée. Il
participe aux combats de Bligny sous Ouche (3/12/70), à Nuits (18/12/70) et
entre à Dijon à la tête du CA.
Le 13 février 71 il est nommé
divisionnaire à Chambéry, mais est relevé le 26 du même mois. Républicain modéré mais populaire parmi les parisiens qui ont su apprécier son "battant", Cremer est le jour même de son arrivée à Paris après le 18 mars, proposé pour être commandant de la Garde Nationale fédérée. On ne sait exactement quel double-jeu il a réellement joué, se montrant, au début, proche des aspirations républicaines et patriotes de la futur Commune de Paris, puis s'éclipsant mais sans prendre aucun commandement dans l'armée Versaillaise, à l'instar de d'autres officiers méritants et combatifs (d'opinion républicaine ) comme le défenseur de Belfort, Denfert-Rochereau.
Après la guerre, la commission
des grades le remet chef d’escadron, en disponibilité pour avoir continué la
guerre en dépit de la reddition de l’armée à Metz. Symbole de l’épuration des
officiers républicains de l’armée par les anciens officiers impériaux, il
adresse une lettre ouverte au ministre :
"Je reçois à l’instant la
lettre de service qui me notifie la décision de la commission de révision des
grades. Tant de générosité me touche et je ne saurais mieux le reconnaître
qu’en alléguant, autant qu’il est en mon pouvoir, les charges de l’Etat. J’ai
donc l’honneur de vous adresser ma démission, me contentant comme récompense de
quinze années de service d’avoir mes biens confisqués, mon père exilé, mon
frère tué et mon pays natal livré. Tant de bonheur me fait redouter ceux que me
réserve l’avenir que vous me faites, et je préfère attendre en simple citoyen
l’occasion de refaire la guerre aux Prussiens. Veuillez agréer monsieur le ministre
l’assurance de tout le respect avec lequel j’ai l’honneur d’être votre très
dévoué et obéissant serviteur. Cremer, Lorrain annexé et ex général
gambettiste."
Cette lettre publique lui vaut
une commission d’enquête et le 15 novembre 1871, il est mis en réforme pour
faute grave contre la discipline.
Sa carrière militaire est alors
terminée. Le général Cremer s’est éteint en 1876.
Très chouette, comme post!
RépondreSupprimerPhil.
Bonjour. Merci d'avoir mentionné mon livre.
RépondreSupprimerL'amourette, c'est pour le côté romanesque, pour faire passer la pilule. Des études sérieuses sur la bataille de Nuits ont déjà été faites, ce n'était donc pas le but du livre. Ceci dit, tous les faits sont rigoureusement exacts (cf bibliographie). C'est l’intérêt du livre, de connaître l’événement par une lecture facile. Alain Fauconnier
Alain Fauconnier.
Quand on pique les photos sur un Blog, on peut au moins mettre les sources ;)
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